Chacun de nous a une conscience aiguë de ses droits et nous n’hésitons jamais à les revendiquer et à nous en prévaloir en toutes circonstances.
Et ces droits nous souhaitons les voir reconnus et rendus effectifs par toutes et tous. Nous sommes tellement imbibés de ce concept que nous pensons avoir des droits envers et contre tous, Dieu y compris.
Le concept de jugement dernier ne renvoie-t-il d’ailleurs pas à la terminologie du droit et du monde judiciaire. L’islamisation de la société marocaine sous la double action des choix du deuxième Monarque du Maroc indépendant et des pétromonarchies a enfanté des masses persuadées que le seul accomplissement des cinq piliers de la Foi leur donnerait le droit incontestable de franchir les portes du Paradis.
Alors qu’en réalité mes amis, des droits nous n’en avons aucun si nous y réfléchissons bien.
La nationalité qui est la nôtre n’est qu’un heureux ou malheureux hasard, l’Etat dans lequel nous vivons, la famille qui nous accueille, les facultés physiques ou intellectuelles dont nous sommes dotées, tout cela ne nous découle pas d’un quelconque droit mais, selon la croyance de chacun, des choix d’un grand architecte de l’univers ou d’un magnifique chaos.
Comment revendiquer un quelconque droit quand rien de ce nous nous sommes, de ce que nous avons, de ce qui nous constitue ne peut réellement nous être attribué à mérite.
De ce que nous faisons, de nos actions, seules, nous sommes les maîtres. Et de ces actions seules nous pouvons nous enorgueillir ou nous blâmer.
Et comme tout juriste le sait, les actions ne créent généralement pas des Droits mais des obligations. Faire, agir génère de multiples devoirs et le premier d’entre eux est celui d’être un bon citoyen.
Et comme cela a été affirmé par d’autres il y a quelques siècles, nul n’est bon citoyen, s’il n’est bon fils, bon père, bon frère, bon ami et bon époux.
De bons fils, nous ne sommes plus. Car sinon comment pourrions-nous accepter que nos pères ne puissent pas avoir accès après des décennies de durs labeurs à une pension de retraite décente, aux soins et à la sécurité qui leur permettrait de finir leur vie dignement.
De bons pères nous ne sommes plus. Car sinon comment pourrions accepter l’état de délabrement avancé de notre système éducatif et la cohorte de diplômés chômeurs et d’immolations qu’il génère ?
De bons frères nous ne sommes plus. Car sinon comment pourrions-nous accepter les murs que nous érigeons avec nos voisins immédiats et les régions que nous laissons dépérir ?
De bons amis, nous ne sommes plus. Car sinon comment pourrions-nous accepter l’absence quasi-totale de solidarité et de redistribution de richesses pourtant collectivement produites ?
De bons époux nous ne sommes pas. Car sinon comment pourrions-nous accepter les inégalités de traitement, le sexisme ambiant, les agressions sexuelles quotidiennes et la spoliation dans l’héritage dont nos femmes sont victimes ?
Responsabilités vis-à-vis de la terre qui nous accueille et nous nourrit, devoirs envers celles et ceux qui nous accompagnent, devoirs envers celles et ceux qui nous éduquent et plus généralement envers toutes celles et tous ceux qui nous consacrent une partie de leur vie puisque rien de plus précieux que le temps ne peut être offert ici-bas.
Nous avons une dette immense envers la collectivité et notre tâche première doit être de nous en acquitter. Cette tâche nous devons et nous pouvons nous en acquitter cela par exemple en étudiant lorsque l’on est en âge d’étudier, en travaillant par la suite sans relâche pour le progrès et l’avènement de la concorde universelle.
Cette contribution à l’œuvre collective est malheureusement actuellement balbutiante chez nous. Certes nous avons par le passé fortement et remarquablement contribué au progrès et à la civilisation.
Mais les étoiles se sont éteintes, nous avons cessé de vouloir vivre, progresser, changer, nous développer et nous avons préféré considérer qu’il nous fallait arrêter le temps, que nous n’étions finalement que dans une antichambre qui ne mérite ni notre respect ni notre dévouement.
Parce que nous n’avons plus le courage de faire, de vivre, de participer, de contribuer au rayonnement du monde alors nous souhaitons figer ce monde et les choses dans le hasard d’une naissance et du fait de cette naissance, revendiquer le droit de franchir les portes du paradis quitte à faire de la vie de tous ici-bas un enfer.
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