Les invités : Abdelkrim Belguendouz, Professeur universitaire, Olivier Deau, Membre de la Fédération des Français à l’Etranger du Parti Socialiste, Christophe Nevers, Délégué Les Républicains à Rabat et Mohamed Abdi, Ancien haut fonctionnaire français, militant associatif et membre du Parti Socialiste
La déchéance de nationalité est en train de faire son petit bonhomme de chemin en France, doucement vers une inscription dans la Constitution. Doit-elle, justement, être inscrite dans la Constitution, doit-elle ne concerner que les binationaux ou doit-elle s’étendre à tous les français au risque d’apatride pour ceux qui ne détiennent que la nationalité française ? Voilà le débat qui divise la classe politique française depuis plusieurs mois.
La mesure a été annoncée par le président français trois jours seulement après les attentats du 13 novembre 2015. Dans un discours devant les parlementaires, il avait annoncé, je cite « nous devons pouvoir déchoir de sa nationalité française, un individu condamné pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme, même s’il est né français, et je dis bien même s’il est né français, dès lors qu’il bénéficie d’une autre nationalité » Fin de citation. Si l’annonce de cette mesure n’avait pas choqué dans une France profondément choquée et émue par l’ampleur des dégâts des attentats de Paris, l’émotion passée, les divisions politiques ont vite repris leurs droits. Car si la mesure a été globalement applaudie à droite, à gauche c’est la fracture, parfois même, l indignation.
L indignation, au final, contre la mesure dans sa forme, car dans le fond, la déchéance de nationalité n’est pas une nouveauté. La mesure existe en France en réalité depuis 1848 avec un décret qui prévoyait au moment de l’abolition de l’esclavage une déchéance de nationalité pour tout Français qui continuait à pratiquer la traite ou à acheter des esclaves.
Et alors que le président français et sa majorité gouvernementale veulent que le monde voit jusqu’à quel point la France est prête à tout contre le terrorisme, certains voient dans le tout un peu n’importe quoi surtout dans la version du texte qui prévoit la déchéance de nationalité pour les français naturalisés mais aussi pour ceux qui sont nés français, ce qui se présente en grande menace au droit du sol, cher au cœur des socialistes. Et puis que dire des terroristes détenant uniquement la nationalité française, seraient-ils de ce fait moins terroristes que les autres ? Et si la déchéance de nationalité venait à leur être appliquée également, que faire des conventions internationales contre l’apatride ?
Contre déchéance de nationalité, certains proposent une déchéance de citoyenneté. Contre déchéance de nationalité, d’autres proposent de bannir la double nationalité. De toutes les manières, François Hollande est appelé à choisir entre toutes les propositions qui se présentent à lui le meilleur du pire ou le pire du meilleur et quel serait le comble d’un socialiste français, si ce n’est que de défendre corps et âme, une idée que le Front National a toujours appelé de ses vœux.
La constitutionnalisation de la déchéance de nationalité est-elle nécessaire ou du moins utile ? Les divisions qu’elle ne cesse de creuser à gauche de l’échiquier politique français sont-elles le coup de grâce apporté à un processus d’implosion au sein de la gauche, est-ce un accès de fièvre dans un corps déjà très malade? La déchéance de nationalité, si elle est adoptée, serait-elle une arme efficace contre le terrorisme ? C’est le débat que nous ouvrons cet après-midi avec nos invités dans Avec Ou Sans Parure.
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