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Silicon Valley

La liberté pousse-t-elle dans la Silicon Valley ?


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Silicon Valley

On s’en souvient, au début de 2016, un curieux feuilleton a fait les gros titres de la presse mondiale plusieurs semaines. Le FBI demandait à Apple une « clef » pour débloquer le téléphone d’un des auteurs de la tuerie de San Bernardino. La firme à la pomme s’y est refusée catégoriquement. (Il semble que c’est finalement une société israélienne qui a vendu ce service au bureau américain.) À l’exception notable d’Amazon et d’Oracle — la dirigeante de cette dernière venant de rejoindre l’administration Trump —, le 16 décembre, Microsoft, Apple, Google, Uber et IBM, après Twitter et Facebook, déclaraient formellement à la presse qu’elles refuseraient de participer à l’élaboration d’un fichier des musulmans, que « le Donald », comme l’appelle son épouse, avait évoqué durant sa campagne rocambolesque.

Ces très sympathiques prises de position — risquées pour Apple, mais encore seulement théoriques pour les autres — soulèvent quelques questions. On voit là, en effet, des entreprises commerciales défendre le ou les droits de leur clientèle contre un État. Certes, il s’agit d’un État à propos duquel on peut concevoir de sérieuses inquiétudes, même si l’on n’est pas Irakien, désormais. Mais c’est une situation complètement inverse de l’européenne où, par exemple, le gouvernement de Mme Merkel somme un Facebook — de moins en moins réticent, peut-être, mais toujours particulièrement lent — de se montrer beaucoup plus efficace dans le filtrage des fake news et des propos racistes.

On trouve une explication de cet apparent paradoxe chez un auteur comme David Golumbia, qui a publié La Logique culturelle de l’informatique, en 2009 aux presses universitaires d’Harvard, ainsi qu’une tribune très remarquée, en 2013, dans la revue Jacobin, aux USA. Il y expliquait que le temps des hippies libertaires est fini et que, maintenant, les grands patrons de l’électronique californienne sont des libertariens. À ne pas confondre avec les premiers. Pour faire bref, je cite : «Ils dépeignent systématiquement le gouvernement comme l’ennemi de la démocratie plutôt que sa réalisation potentielle. En général, ils refusent d’interpréter le pouvoir des entreprises sur le même niveau que le pouvoir gouvernemental et suggèrent le plus souvent que des sociétés comme Google ou Facebook ne devraient dépendre d’aucun contrôle gouvernemental.» L’État, non ; l’entreprise, oui. En somme, le cœur même du discours de Trump, mais les slogans et les provocations racistes et xénophobes, en moins.

Ces derniers sont, en effet, la meilleure explication de la tête de trois kilomètres de long que faisaient nos si gentils patrons du silicone lors de la réception en leur honneur qui s’est tenue le 14 décembre sous les ors über blings de la Trump Tower. La scène valait largement celle de L’Empire contre-attaque, où Han Solo et la princesse Leia sont invités à s’asseoir à la table d’un Darth Vader passé du côté obscur de leur propre force — familiale.

Enfin, si le président élu est désormais très vague sur son intention réelle quant aux musulmans, immigrés et réfugiés, il vient de provoquer de très légitimes inquiétudes au sein du Ministère de l’Énergie américain, en lui demandant :

  1. a) la liste de ses fonctionnaires et contractuels qui ont participé aux conférences sur le climat de l’ONU, les COP de ces cinq dernières années ;
  2. b) la liste de tous ceux qui ont participé à des réunions sur le coût social du dioxyde de carbone ;
  3. c) la liste de toutes les publications scientifiques des employés des 17 laboratoires nationaux du ministère durant les trois dernières années.

Soit tous les outils nécessaires pour que le très climatosceptique futur président-entrepreneur puisse, éventuellement, lancer une véritable chasse aux sorcières… chez les fonctionnaires et les scientifiques. Et, là, il n’y aurait nul milliardaire pour les protéger du milliardaire politicien.

En 2000, le très britannique duo électronique Goldfrapp, publiait le morceau Utopia. Les images du clip font à la perfection référence à Man Ray comme à Leni Riefenstahl. Le single se révèle être la bande son la plus adéquate de ces bientôt 17 premières années du millénaire, sur la planète entière.

https://youtu.be/QUB7e3BtnvU


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