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Venise

Mort à Venise


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Venise

Au fond du Grand Canal de Venise.

Pateh Sabally, c’est son nom, a terminé sa quête d’un monde meilleur au fond du Grand Canal de Venise sous les yeux de centaines de personnes au mieux indifférentes au pire insultantes.

Pateh, le gambien, a triomphé du sahel et de ses terroristes.

Pateh, l’africain, a survécu au chaos libyen et au racisme des Nord-Africains.

Pateh, l’homo sapiens, a vaincu la méditerranée et ses périls.

Pateh a pris Lampedusa.

En vain.

Tous ces obstacles, Pateh, les a franchi parce qu’il pensait que de l’autre côté une vie et une humanité meilleure l’attendait.

À tort.

De l’autre côté, Pateh Sabally, comme des millions d’autres qui ont sa couleur de peau, n’a trouvé le plus souvent que des policiers rugueux, des visages durs, des regards méprisants et des mots dont heureusement il ne comprend pas la signification.

Ce que personne n’a dit à Pateh, c’est que de l’autre côté de la méditerranée, des gens comme lui ne sont pas les bienvenus, ne sont plus les bienvenus.

Ceux de l’autre côté, Pateh, veulent imperméabiliser les frontières, construire des murs, remettre en cause le droit d’asile, retirer la nationalité à ceux qui te ressemblent et qui auraient pu l’obtenir, renvoyer le plus loin possible tout ce qui les éloigne de ce qu’ils croient être leur identité.

Car vois-tu, Pateh, pour eux, y a trop d’étrangers en Europe, trop de réfugiés, trop de jeunes hommes trop vigoureux, le seuil de tolérance est dépassé.

Les réfugiés comme toi nuisent à l’image de Vénise, à sa réputation de cité éternelle de l’amour et du romantisme. Comment séduire sa belle en usant de la langue fleurie des conteurs orientaux quand on est sans cesse interrompu par des va-nu-pieds avec qui tu partages plus que la couleur de peau ?

Ce n’est tout simplement pas possible.

C’est pourquoi, Pateh, le mieux que tu puisses faire c’est de disparaître. D’Europe car tu es illégal ou de la surface de la terre. Ce choix t’appartient.

Et si au lieu de retourner dans ton noir continent, tu choisis de disparaître corps et biens et bien personne ne t’en empêchera.

C’est ainsi, Pateh, qu’il est possible de mourir en pleine journée devant des centaines de personnes dans l’artère la plus fréquentée de Venise. Et cela sans qu’une seule personne n’intervienne.

Notre monde t’aura abandonné du début à la fin, ne t’aura accordé aucune considération, même dans la mort.

Pardonne-nous mon frère !


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