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Puritanisme

Puritanisme pour tous


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Puritanisme

Selon le dictionnaire, « puritanisme » a deux sens. Le mot désigne d’abord la doctrine et la manière de vie d’une forme de protestantisme née en Angleterre. Par extension, on l’utilise pour toute forme de rigorisme excessif en morale. Pour l’aspect historique, l’expression semble être née vers 1560, lorsqu’une fraction réformiste, formée à Genève, chez les calvinistes et en Allemagne chez les luthériens, s’opposait à l’organisation par la reine Elizabeth de l’Église anglicane — qui ne faisait pas assez sécession d’avec Rome, selon eux.

Après un siècle troublé, où ils furent tour à tour assimilés ou persécutés, la monarchie anglaise, restaurée en 1660, décida d’expulser ces puritains en Nouvelle-Angleterre et au Massachusetts, principalement. Ils avaient déjà commencé à s’y installer.

Ainsi, en 1659, le Code des lois de la colonie de la baie du Massachusetts punissait d’une amende de cinq shillings quiconque était surpris à festoyer ou à « entraver le travail » le jour de Noël. Pas assez chrétienne à leurs yeux, la fête de la naissance de Jésus — d’instauration tardive, il est vrai — avait été interdite. Plus largement, les prêcheurs puritains ont tenté, et parfois réussi, à bannir la musique et la danse, tout au long de l’année. Oui, la démarche peut nous rappeler quelque chose.

C’est dans cette même colonie que s’est tenu le tristement célèbre procès des sorcières de Salem, dont l’histoire servira de trame à la pièce de théâtre d’Arthur Miller — qui dénonçait le Maccarthysme, en 1952. Une fois les excès résorbés par les effets du temps qui passe, la culture puritaine est restée vive, malgré tout, dans le nationalisme américain. En 1802, encore, le Congrès américain a interdit la fête de Noël. Au sens extensif, ailleurs, le puritanisme caractérise le XIXe siècle européen.

Un contrôle rigoureux des corps et des mœurs se met en place avec les États-nation, il accompagne le triomphe d’un ordre libéral bourgeois, à telle enseigne que d’un côté le marxisme naissant va transmettre cette obsession aux dictatures communistes du XXe, tandis que, de l’autre, la choc colonial va l’imposer par la force ou l’imprimer aux mouvements dits réformistes de la Nahda.

Avant cela, on peut relever que c’est en toute indépendance mais avec une remarquable synchronicité que, au fond du Nadjd, est né le premier royaume wahhabite, en 1745. Condamné par tous les oulémas, de Fès à Bagdad, il sera mis à bas en 1818 par le califat ottoman, qui a envoyé l’armée égyptienne faire un peu de ménage dans une péninsule passablement déstabilisée par de nombreuses exactions, dont des massacres de chiites et les très remarqués pillages de La Mecque et Médine.

C’est dans les années 1920, après la chute du califat qu’un agent britannique, St-John Philby, va aider les Saoud à prendre le pouvoir — pour le plus grand bien du commerce impérial anglais, d’abord — puis à sceller leur alliance indéfectible avec les USA, en 1945. Les deux puritanismes, depuis, s’entendent comme larrons en foire.

L’alliance n’est pas que de realpolitik, et ne se limite pas non plus à des intérêts économiques tellement imbriqués que, l’on s’en souvient, les familles Bush et Ben Laden partageaient, il y a quinze ans, la même société de gestion de leurs investissements, le Carlyle Group. Cette association repose aussi, et peut-être surtout, sur des conceptions puritaines communes — et d’ailleurs largement partagées par une bonne frange de l’extrême droite israélienne.

Parmi ces conceptions, une certaine idée des rapports de genre est des plus Évidemment, les luttes féministes aux USA y ont placé nos modernes puritains sur la défensive ces dernières décennies, mais l’on voit, à travers les thèmes chers à l’alt-right et l’ « humour » assumé du candidat Trump, qu’ils sont désormais à l’offensive. Il s’agit de mettre les femmes, avec ou sans permis de conduire, à la cuisine, et d’encourager partout un ethno-nationalisme qui justifiera une guerre de tous contre tous. Tel est le programme du « national-puritanisme » pour le XXIe siècle.

Peu connu du grand public, mais respecté par la critique et les DJs, le groupe anglais Unforscene publiait en 2003 son second album, New World Disorder, qui se conclut par un élégant hommage à Herbie Hancock, avec 5AM Shutdown.


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