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Tahar Ben Jelloun

Tahar Ben Jelloun, un « Harki de service » selon Rachid Achachi


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Tahar Ben Jelloun

La tendance d’une certaine élite culturelle marocaine vivant à l’étranger, de s’exprimer de façon outrancière sur des questions sensibles de politique ou de société internes au Royaume est au centre des polémiques ces derniers jours. Pour cause, une déclaration de l’écrivain Tahar Ben Jelloun depuis la France sur les électeurs marocains a suscité la colère des militants du parti vainqueur des élections. M. Tahar Ben Jelloun a en effet estimé que le PJD était « rétrograde, homophobe et raciste » et que les marocains qui ont voté pour ce parti politique « ne sont pas éduqués et ne comprennent pas les vraies valeurs de la démocratie ». Des propos qui s’associent à ceux de Leila Slimani, récente lauréate du prix Goncourt, qui, depuis la France également avait dénoncé les humiliations que subissent les homosexuels au Maroc. Ce jeudi 8 décembre, lors de la tenue de ce débat sur Luxe Radio animé par Naima Mouaddine, le chroniqueur Aziz Boucetta a estimé que le Maroc est un pays très complexe même pour les citoyens ayant grandi dans ses terres. Il regrette que M. Benjelloun ait tenu ces propos dans un contexte aussi sensible que celui-ci. Il considère même ces paroles comme étant « des insultes envers ce parti ». Aziz Boucetta ajoute enfin que ces marocains qui cherchent de la visibilité comme Rachida Dati, Leila Slimani ou Jamal Debbouz ont besoin des médias pour vivre et s’expriment sur des sujets qu’ils ne maîtrisent pas forcément.

Driss Jaydane, ne partageant pas l’avis de Aziz Boucetta, estime lui qu’à partir du moment que nous acceptons les éloges des marocains de l’étranger, il faut également que nous assumions leurs critiques. Pour le chroniqueur philosophe, vous ne pouvez pas faire taire quelqu’un pour la raison qu’il ne corresponde pas à votre « marocain type » car le « marocain type » n’existe pas, il y a une mosaïque avec des gens qui veulent s’exprimer et d’autres non. « Le fait que les élites en général soient un peu déconnectées de la réalité est un vieux débat qui ne tient plus aujourd’hui », ajoute t il. Driss Jaydane a également rappelé la marocanité de Tahar Ben Jelloun à travers ses œuvres comme « l’Homme rompu » ou « Harrouda ». « Si ne nous ne sommes pas capables d’entendre la parole de tous nos enfants, nous ne pouvons pas non plus parler en tant que Casablancais sur le sud du Maroc, sur le Moyen Atlas ou même sur Donald Trump », précise t il.

Talal Chakir va quant à lui dans le sens de Aziz Boucetta. Il rappelle, comme l’a dit Naima Mouaddine, que les marocains en général peuvent s’exprimer mais ne peuvent pas insulter. Il dénonce également le fait que Tahar Ben Jelloun ait pris une position sur le PJD mais pas sur le maillot à manche ou sur le racisme des politiques français durant l’été dernier. En d’autres termes, Tahar Ben Jelloun s’exprime concernant son pays d’origine mais oublie de le faire pour le pays où il vit. « Il a rejeté un million et demi d’électeurs marocains dans leur choix ; un homme aussi grand dans son esprit ne doit pas être l’objet d’un spectacle en utilisant la violence dans le verbe » clame t il. Talal Chakir estime que Tahar Ben Jelloun aurait dû débattre de la politique marocaine depuis le Maroc et avec des personnalités proches de la réalité marocaine. Il finit par comparer Tahar Ben Jelloun à Loubna Abidar dans ce qu’il appelle être un « procédé » consistant à donner la parole à des musulmans analphabètes ou lettrés sur des plateaux français dans le but de taper sur leur propre religion, culture et traditions, et de les faire tourner en dérision. « Nous pourrions faire de même ici au Maroc en invitant des gens comme Etienne Chouard ou Michel Collon », allusion faire à des intellectuels français n’entrant pas dans le moule de l’internationalisme des salles de rédactions parisiennes, insiste t il.

Enfin, Rachid Achachi estime que Tahar Ben Jelloun a eu un discours occidental libéral sur le Maroc, considérant son référentiel intellectuel. Il s’agit d’un discours « qui trouve sa place uniquement au sein d’une élite ou d’une avant-garde de la population marocaine, mais pas au sein de la majorité de la population, située entre la tradition et la modernité ». Pour le chroniqueur anthropologue de Luxe Radio, Tahar Ben Jelloun a parfaitement le droit de parler et d’exprimer son point de vue, mais ce qu’il dit est inadéquat à la réalité du Maroc. Le débat sur l’adéquation est différent de celui sur la liberté d’expression. En gros, Tahar Ben Jelloun tient des propos  » totalement déconnectés de la réalité marocaine, et se fait passer pour un « harki de service » pour certaines tendances politiques en France développant un discours anti-musulman et anti-maghrébin, a ajouté Rachid Achachi. Une expression jugée « forte » par Naïma Mouaddine et sur laquelle le chroniqueur répond que c’est « une question de point de vue ».

Aziz Boucetta conclut le débat en estimant que critiquer la politique française depuis l’étranger est assimilé dans la culture de l’Hexagone, mais traiter depuis l’étranger un parti marocain de « raciste » ou ses électeurs de « non éduqués » ne passe pas au sein de notre société. Nous avons besoin de gens qui disent des choses sur le Maroc, mais à condition d’être crédibles. Driss Jaydane répond que chaque homme est responsable de sa parole, que nous pouvons contester ses propos mais que nous ne pouvons pas lui retirer la légitimité de parler à cause d’une question de « territoire » ou « d’étiquette ». Écoutez le Débat!


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